Les révolutions arabes, un espoir pour l’abolition ?

MENA

le 4 avril 2011

Bien que plusieurs pays arabes se soient abstenus d’utiliser la peine de mort depuis plusieurs années ou même décennies, l’abolition y semblait peu réaliste.
Le Coran décourage l’utilisation de la peine de mort et encourage d’autres moyens de résolution des litiges, mais il autorise la peine capitale dans certaines situations. Cela constitue le fondement des arguments rétentionnistes dans le monde arabe.

L’espoir et la frustration pour les abolitionnistes arabes

Il y a quelques années, l’abolition avait semblé gagner en crédibilité dans les pays arabes.
Les gouvernements de Syrie et de Jordanie a montré des signes d’ouverture envers l’abolition, ou au moins la diminution du nombre d’exécutions.
Le Maroc, l’Algérie et le Liban étaient allés jusqu’à débattre de projets de loi abolitionnistes dans leur parlements. Mais ces trois textes ont échoué à cause des objections religieuses et de la peur de tout ce qui peut être perçu comme un encouragement au terrorisme.
« La lutte contre le terrorisme rend nécessaire la peine de mort », expliquait un responsable algérien en 2009.  
Selon l’Observatoire arabe de la peine de mort, certains pays arabes abolitinnistes de fait sont revenus sur leurs progrès.  La Mauritanie a ainsi exécuté plusieurs agents d’Al Qaeda après plus d’une décennie sans exécution.
La peur de l’espionnage israélien a ravivé le sentiment publique libanais pour la peine de mort. « Le Liban a des soucis légitime pour la sécurité nationale mais la reprise des exécutions n’est pas une solution », a dit Nadim Houry, le directeur de Human Rights Watch à Beyrouth.
De plus, la Charte arabe des droits de l’Homme, signée par des pays arabes en 2008, permettait toujours les exécutions des mineurs dans certaines situations.
Cela a mené le haut-commissaire de l’ONU aux droits de l’Homme, Louise Arbour, à publier un communiqué disant que les Nations unies « n’acceptent pas ces incohérences ».
Début 2011, les seuls territoires arabes abolitionnistes étaient Djibouti et le Sahara occidental, dont l’indépendance n’est pas officiellement reconnue.

Changements politiques et nouvelles possibilités

Avec les révolutions en Egypte et en Tunisie et des mouvements sociaux importants dans plusieurs autres pays arabes, le débat sur la peine de mort sera peut-être reconsidéré par les nouveaux dirigeants.
A la suite du départ du président Ben Ali en janvier, des rumeurs ont indiqué que le gouvernement tunisien allait signer toutes les conventions actuelles sur les droits de l’Homme, y compris le Protocole sur l’abolition de la peine du mort.
Rien officiel ne s’est passé, mais cela indique peut-être un volonté du gouvernement à changer le statu quo.
L’Egypte, l’un des pays arabes qui commet le plus d’exécutions, vient de limiter les pouvoirs du président par référendum. Le pays va bientôt organiser ses première élections démocratiques depuis 30 ans.
Plusieurs candidats possibles, dont Mohammed El Baredei et Amr Moussa, ont une bonne réputation quant à la défense des droits de l’Homme.
Cependant, le recul public du gouvernement égyptien sur la Résolution 65/206 de l’Assemblée générale de l’ONU appelant à un moratoire sur l’utilisation de la peine de mort montre qu’il y reste beaucoup de travail à y faire.
Les effets à long terme de ces changements sociaux sont difficiles à prévoir, mais ils pourraient au moins ouvrir un chemin pour une relance du débat sur les droits de l’homme en général, et la peine de mort en particulier.
Les gouvernements d’Algérie, du Yémen et de Syrie  font face à une pression énorme pour lever leurs états d’urgence qui ont réprimé la liberté d’expression de deux générations d’Arabes.
Une ouverture de l’espace politique dans ces pays pourrait donner aux organisations abolitionnistes l’occasion de présenter leurs idées librement et sans crainte.

Photo : Essam Sharaf

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