Le Président tanzanien prend position contre la peine de mort.

Bonnes nouvelles

Publié par Thalia Gerzso, le 20 septembre 2017

Lors de l’investiture de son nouveau Ministre de la Justice, Président Magufuli a fait un commentaire inattendu concernant la peine de mort. Alors qu’il mentionnait le sort des 491 prisonniers incarcérés dans les couloirs de la mort tanzaniens, le Président a déclaré : « Je comprends les difficultés rencontrées lors de la mise en œuvre de ces condamnations. Je demande donc aux tribunaux de ne plus me soumettre la liste des noms des prisonniers attendant d’être pendus (…) On m’a dit que de nombreuses personnes attendent d’être exécutées, mais s’il vous plait ne m’apportez plus ces listes. Comme tout politicien, nous ne sommes pas heureux de poursuivre cette entreprise ».

Pour Fulgence TM, directeur de la clinique d’aide judiciaire au Legal and Human Rights Center (LHRC), cette déclaration ouvre un débat au sein de la société tanzanienne. En effet, depuis cette annonce présidentielle, les membres de l’opposition et de la société civile ont beaucoup débattu du sort de la peine de mort dans le pays. « Il semblerait que ce discours ait libéré la parole de ceux qui n’osaient pas prendre position. » a déclaré Fulgence TM. Sur la télévision locale, aucun commentaire n’a été fait en faveur de la peine de mort. « La population estime que la peine de mort est un héritage colonial. Personne n’est en faveur de la peine de mort. C’est le bon moment pour remettre en cause son existence. » a continué Fulgence TM.

Même si aucune exécution n’a eu lieu depuis 1994, la déclaration du président tanzanien pourrait jouer sur le destin des 491 prisonniers détenus dans les couloirs de la mort. Selon la clinique d’aide judiciaire de LHRC, ce soutien présidentiel permettra de contester la peine de mort obligatoire devant les juges de la Haute Cour. S’il est impossible de prédire avec certitude la réaction des juges, la branche judiciaire du pays respectera sans doute les instructions du pouvoir exécutif selon les observateurs locaux. En effet, dans un système où les juges sont nommés par le Président lui-même, un désaccord entre les deux branches semble peu probable. « Le temps est à la discussion avec le procureur général afin d’obtenir une commutation générale des peines de mort. La signature du moratoire sur l’application de la peine de mort des Nations unies constituerait une première étape. » a ajouté Fulgence TM.

Pour le mouvement abolitioniste cependant, l’objectif à long terme reste l’abolition totale de la peine de mort en Tanzanie. Même si ce discours constitue un premier pas, les actions du président devraient se matérialiser autrement que par de simples mots. « Le chef de l’Etat devrait initier le changement et soulager les juges et les magistrats des difficultés qu’ils rencontrent lorsqu’ils prononcent une peine de mort » a déclaré Dr Hellen Kijo-Bisimba, directrice exécutive de LHRC. Déterminées, les organisations abolitionnistes tanzaniennes restent concentrées sur leur objectif premier. L’organisation tanzanienne Children Education Society (CHESO) organisera du 1er octobre au 10 octobre, date de la Journée mondiale contre la peine de mort, plusieurs évènements visant à mettre en lumière la problématique de la peine de mort et à demander son abolition. Ainsi, la 15ème Journée mondiale contre la peine de mort apparait comme une occasion supplémentaire pour mettre la peine de mort au centre de l’agenda politique tanzanien.

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