Exécutions au Japon : « Un pas en arrière pour l’Asie »

Asie

le 30 juillet 2010

La ministre de la Justice Keiko Chiba (photo) a annoncé mercredi avoir assisté à la pendaison de deux meurtriers dont elle avait signé les ordres d’exécution.
Chiba, qui avait dans le passé pris position contre la peine capitale, a déclaré qu’elle mettrait en place une commission sur la peine de mort et permettrait désormais aux journalistes d’accéder au lieu d’exécution. Mais l’abolition « relèvera de ce que le peuple de ce pays décidera, si après des discussions variées la majorité de l’opinion publique est favorable à ceque la peine de mort soit abolie », a-t-elle ajouté, selon le journal Yomiuri Shimbun.
Les défenseurs des droits de l’Homme ont sévèrement critique les deux exécutions, les premières depuis un an au Japon.
L’organisation membre de la Coalition mondiale Centre pour les droits des prisonniers (CPR) a regretté que Chiba ait mis si longtemps à prendre des mesures contre le secret qui entour la peine de mort dans lepays. « La mise en place d’un débat et d’une certaine transparence dansl’information aurait du intervenir bien plus tôt, pas après avoir enlevé deux vies », a déclaré CPR dans un communiqué.
Dans une lettre ouverte commune à Chiba, Maiko Tagusari, secrétaire de CPR, et Souhayr Belhassen, présidente de la Fédération internationale des liguesdes droits de l’Homme, ont condamné les exécutions. « Nos organisationssont profondément déçues de voir un ancien membre de la Ligue parlementaire contre la peine de mort et une avocate réputé en matière de droits de l’Homme comme vous décider des ordres d’exécution », écrivent-elles.

Comme Taïwan, le Japon rompt un moratoire officieux

Un autre membre de la Coalition mondiale, l’Alliance taïwanaise pour mettre fin à la peine de mort (TAEDP), a qualifié les exécutions au Japon de « pas en arrière pour l’Asie ». L’organisation a établi un parallèle entre le Japon et Taïwan, où les exécutions ont repris après un moratoire officieux de quatre ans. « Comme la ministre japonaise de la Justice, le ministre taïwanais de la Justice Tseng Yung-fu avait auparavant pris position en faveur de l’abandon de la peine de mort et a mis en place une commission dans le cadre du ministère pour étudier la peine capitale. Les deux ministres ont autrefois exprimé de sérieuses réserves quant à la peine de mort, mais ils ont ensuite signé des ordres d’exécution et ont fermement défendu leurs actes », regrette TAEDP dans un communiqué.
Amnesty International, qui a récemment révélé les dégâts causés par le système japonais de peine de mort sur la santé mentale des condamnés, s’inquiète du risque prochain de nouvelles exécutions parmi les 107 détenus du couloir de la mort nippon.« Un groupe de travail pour discuter de la peine de mort ne suffit pas.Il faut un débat public ouvert et un moratoire immédiat sur les exécutions pendant que ces discussions se déroulent », a affirmé Donna Guest, directrice adjointe du programme Asie-Pacifique d’Amnesty International.
Au niveau diplomatique, la représentante de l’Union européenne Catherine Ashton a « profondément regretté » les pendaisons de Hidenori Ogata et Kazuo Shinozawa, et appelé le Japon a établir un moratoire sur les exécutions afin de « mettre le Japon en phase avec la tendance mondiale qui s’éloigne de la peine de mort ».

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