Les courageux défenseurs des droits de l’homme en Iran et leur lutte contre la peine de mort

Asie

Publié par Amnesty International, le 5 mars 2018

Le 10 octobre, partout dans le monde, des personnes ont célébré la Journée mondiale contre la peine de mort. Cette année est particulièrement importante pour Amnesty International car elle marque le 40e anniversaire du lancement de sa campagne pour l’abolition de la peine de mort dans le monde en 1977.

Depuis ce moment historique, les pays qui ont recours à la peine de mort sont devenus une minorité de plus en plus isolée. De fait, en septembre 2017, plus des deux tiers des pays du monde avaient aboli la peine de mort en droit ou en pratique.
Cependant, alors que le monde s’éloigne de la peine de mort, l’Iran continue d’exécuter des centaines de personnes chaque année, se positionnant en deuxième place, après la Chine, en termes de nombre d’exécutions chaque année. Amnesty International a enregistré près de 1000 exécutions en Iran en 2015 et au moins 567 en 2016.

Mouvement national contre la peine de mort

L’engagement obstiné des autorités iraniennes à l’égard de ce châtiment cruel et irréversible est largement connu, mais ce qui l’est peut-être moins, c’est l’histoire du mouvement national grandissant contre la peine de mort en Iran et les courageux défenseurs des droits de l’homme qui le font vivre.

Ces hommes et ces femmes luttent contre vents et marées pour mettre leur pays en conformité avec le droit international en matière droits de l’homme et les normes relatives à la peine de mort, ainsi que pour réaliser leur vision d’une société humaine dans laquelle la peine de mort n’a pas sa place. Cela n’est pas passé inaperçu pour les autorités.

En 2013, plusieurs défenseurs iraniens des droits de l’homme ont lancé la campagne Iranienne « Étape par étape, supprimer la peine de mort », connue sous le nom de Legam, son acronyme en persan. En réponse, les autorités ont intensifié leur répression à leur encontre.

Des défenseurs des droits humains emprisonnés pour leur travail contre la peine de mort

Les autorités iraniennes ont poursuivi et emprisonné des personnes impliquées dans le mouvement contre la peine de mort du pays, les accusant souvent de « menacer la sécurité nationale » ou de « défier l’islam ». Dans leurs déclarations officielles et les verdicts des tribunaux, elles qualifient la campagne pacifique contre la peine de mort d’« anti-islamique ».

En 2016, la défenseuse des droits de l’homme Narges Mohammadi, présidente exécutive du Centre des défenseurs des droits de l’homme qui a été dissout, a été condamnée à 16 ans d’emprisonnement, dont 10 ans en raison de sa participation à Legam. Les « preuves » utilisées contre elle au tribunal invoquaient sa vive opposition à la peine de mort et sa participation à des rassemblements hors des prisons pour soutenir les familles des condamnés à mort. En raison de problèmes de santé graves, Narges Mohammadi a besoin de soins médicaux spécialisés continus, qu’elle ne peut recevoir en prison. Les autorités ont refusé son transfert vers un hôpital situé à l’extérieur de la prison d’Evin à Téhéran où elle purge sa peine.

La condamnation de Abdolfattah Soltani, avocat spécialisé dans les droits de l’homme, cofondateur du Centre des défenseurs des droits de l’homme, condamné à 13 ans qu’il purge dans la prison d’Evin, repose également sur son activisme pacifique contre la peine de mort en Iran. Lors de son procès, sa « participation à la mise en place d’un projet visant à mettre fin à la peine de mort pour les mineurs » et « sa vive opposition à la peine de mort comme acte de violence » ont été qualifiées de « propagande anti-islamique » et de « guerre psychologique contre le système. » Depuis son emprisonnement en septembre 2011, Abdolfattah Soltani a été détenu dans de mauvaises conditions et sans accès à des soins médicaux adéquats.

Une autre militante contre la peine de mort, Atena Daemi, purge une peine de sept ans d’emprisonnement à la prison d’Evin après un procès inéquitable : « rassemblement et collusion en vue de commettre des infractions compromettant la sécurité nationale » et « propagande contre le système ». Elle a été condamnée en raison de ses activités pacifiques en faveur des droits de l’homme, notamment la publication sur Facebook et Twitter de commentaires critiquant les exécutions en Iran et la distribution de tracts contre la peine de mort. Atena Daemi se voit refuser l’accès aux soins médicaux spécialisés dont elle a besoin suite à sa grève de la faim début 2017 pour protester contre le harcèlement de sa famille. Plus tôt, en septembre, elle s’était vu refuser une opération urgente de la vésicule biliaire après s’être opposée au port de menottes pendant qu’elle recevait des soins médicaux à l’hôpital.

Le couple d’activistes Arash Sadeghi et Golrokh Ebrahimi Iraee sont également emprisonnés à la prison d’Evin pour leur militantisme pacifique en faveur des droits fondamentaux, et notamment leur opposition à la peine de mort. Arash Sadeghi a été condamné à 19 ans de prison pour ses activités, notamment le fait d’avoir rejoint Legam. Golrokh Ebrahimi Iraee purge deux ans et demi de prison après avoir écrit une histoire fictive sur l’horrible pratique de la lapidation en Iran, une méthode d’exécution qui pourrait être imposée aux personnes reconnues coupables d ‘« adultère » en Iran. Arash Sadeghi se voit également refuser l’accès à des soins médicaux spécialisés adéquats à l’extérieur de la prison, bien qu’il soit gravement malade depuis janvier, date à laquelle il a mis fin à une grève de la faim de 71 jours.

Parmi les autres défenseurs des droits fondamentaux qui ont été poursuivis et emprisonnés pour leur travail contre la peine de mort, se trouvent Mohammad Maleki, cofondateur de Legam, qui fait l’objet d’une interdiction de voyager depuis septembre 2011 et Omid Alishenas condamné à sept ans d’emprisonnement mais libéré plus tôt à condition de rester silencieux une fois sorti de prison et d’arrêter son activisme en faveur des droits de l’homme.

Un militant des droits des minorités condamné à mort

Les défenseurs des droits de l’homme iraniens ne sont pas les seuls à être persécutés par le système de justice pénale du pays pour leur combat contre la peine de mort, certains sont eux-mêmes confrontés à la perspective d’une exécution. Mohammad Ali Amouri, militant des droits des minorités de la minorité arabe iranienne Ahwazi, est dans le couloir de la mort depuis 2012. Il a été condamné à la peine capitale pour ses activités pacifiques au sein du groupe de défense des droits culturels Al-Hiwar, aujourd’hui dissout et qu’il a cofondé. Al-Hiwar a notamment pour mission de promouvoir la culture et l’identité arabes à travers des événements de poésie, des cours de langue et des séances de lecture et de changer les attitudes de discrimination à l’encontre des femmes et des filles en Iran.

Une lueur d’espoir

Malgré la répression incessante contre les défenseurs des droits de l’homme, le mouvement croissant contre la peine de mort en Iran et l’activisme continu de tant de défenseurs courageux des droits fondamentaux permettent d’espérer que l’opinion publique va progressivement évoluer sur cette question et que les autorités iraniennes ne seront pas en mesure d’étouffer indéfiniment les demandes de changement.
Au lieu de maintenir d’année en année leur folie meurtrière, les autorités doivent rejoindre la tendance mondiale contre la peine de mort et abolir une fois pour toutes cette forme odieuse de châtiment.

Tant que cela ne sera pas une réalité, Amnesty International continuera de faire campagne aux côtés des défenseurs courageux des droits fondamentaux en Iran pour défendre et protéger le droit à la vie.

Aidez-nous à soutenir les défenseurs des droits de l’homme en Iran.

En septembre 2017, Amnesty International a lancé une campagne pour mettre fin à la répression iranienne contre les défenseurs des droits de l’homme en Iran. Agissez maintenant en signant notre pétition et en postant le tweet ci-dessous pour exiger que l’Iran cesse de punir les défenseurs des droits de l’homme pour leur activisme pacifique en faveur des droits fondamentaux et leur travail contre la peine de mort.