L’organe africain des droits de l’Homme cible la peine de mort

Afrique

le 16 mai 2011

« La peine capitale est cruelle et donc injustifiable, inutile, irreversible et illogique ; elle représente une violation des plus sérieuses des droits humains fondamentaux, en particulier le droit à la vie selon l’article 4 de la Charte africaine. »
C’est par ces mots que la Commissaire Zainabou Sylvie Kayitesi de la Commission africaine des droits de l’homme et des peuples (CADHP) a décrit la peine capitale dans son rapport à la 49e session de l’organe africain des droits de l’homme, qui s’est tenue du 28 avril au 12 mai 2011 à Banjul.
Kayitesi, qui préside le groupe de travail de la Commission sur la peine de mort, a appelé tous les pays qui continuent à exécuter des condamnés à observer un moratoire comme demandé par les résolutions des Nations unies et de la CADHP. Elle a également appelé la CADHP à prendre des mesures pour l’abolition de la peine de mort.
Le Botswana, la Guinée équatoriale, la Somalie et le Soudan ont procédé à des exécutions en 2010.

Volonté politique contre opinion publique

Un dialogue avec plusieurs pays rétentionnistes a permis de faire avancer le débat sur l’abolition en Afrique, où 16 pays ont abandonné la peine capitale. 20 autres n’ont procédé à aucune exécution depuis plus de 10 ans.
Les représentants kenyans ont expliqué que l’opinion publique bloquait l’abolition en raison du taux de criminalité élevé. Kayitesi a répondu que de nombreux pays avaient aboli la peine capitale sans attendre le soutien de l’opinion, grâce à la volonté politique de leurs dirigeants.
La délégation algérienne a souligné que bien que la peine de mort reste légale dans ce pays, elle n’y a pas été appliquée depuis 1995 et de solides espoirs existent pour une abolition prochaine.
Dans une présentation conjointe, les ONG FIACAT, FHRI et PRI, toutes membres de la Coalition mondiale, ont relevé le cas de la République démocratique du Congo où le parlement a récemment rejeté une proposition de loi d’abolition malgré les assurances du gouvernement selon lequel la constitution rend désormais la peine de mort illégale.
« Les organisations signataires enjoignent la République démocratique du Congo de clarifier sa position concernant la peine de mort et de mettre en œuvre un moratoire sur les condamnations à mort », ont-elles déclaré.

« Double jeu » en Mauritanie

La Coalition mauritanienne contre la peine de mort a dénoncé le « double jeu » des autorités de son pays, selon lequel les cours et tribunaux prononcent un nombre croissant de condamnations à mort pour appliquer ce qu’ils considèrent comme la loi islamique, tandis que le gouvernement, qui se dit abolitionniste, s’assure que ces peines ne sont pas exécutées.
Le 4 mai, la Coalition mondiale et ses organisations membres ont tenu une réunion publique en marge de la session de la CADHP.
La Commissaire Kayitesi y a été rejointe par Asunta Cavaller, de la Commission internationale contre la peine de mort, qui a promis un partenariat entre son organisation et la CADHP.
Flavien Zoma de la FIACAT s’est également exprimé. Venu du Burkina Faso, il a détaillé des chiffres indiquant une réduction de l’utilisation de la peine de mort en Afrique de l’ouest, que ce soit par abolition, moratoire ou réduction du champ d’application de la peine de mort.
Il a cependant alerté les participants sur les obstacles, notamment religieux, qui freinent l’abolition totale dans plusieurs pays ouest-africains.

Photo (de g. à d.) : Moussa Almoustapha, Sécretaire Général de SYNAFEN, Syndicat national des agents de la formation et de l’éducation du Niger ; Mahmoud Mbareck El Hacene, Coalition Mauritanienne contre la peine de mort ; Commissaire Zainabou Sylvie Kayitesi, la Commission africaine des droits de l’homme et des peuples

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